[Lu ailleurs] Une logistique plus verte ?

[Lu ailleurs] Une logistique plus verte ?

Publication initiale sur le site The Conversation 25/08/21

The Conversation

Auteurs : Rebecca Stekelorum, ICN Business School; Issam Laguir, Montpellier Business School – UGEI; Sameer Kumar, University of St. Thomas et Shivam Gupta, Neoma Business School


Après la Covid, un virage plus vert s’amorce dans la logistique

 

En 2019, le transporteur GEFCO a acquis la plate-forme Chronotruck pour réduire le nombre de déplacements perdus. Wikimedia commons, CC BY-SA

Électrification des véhicules de livraison, écoconduite, conception neutre en carbone des entrepôts… les prestataires de service (PSL) se sont engagés depuis plusieurs années à mettre en place des pratiques vertes afin de réduire les conséquences négatives de leur activité sur l’environnement.

À ce jour, 1 170 entreprises du transport de marchandises ont rejoint la charte « Objectif CO2 » permettant d’évaluer, piloter et de réduire les émissions de CO2. L’enjeu est important : le transport routier est le 2ᵉ secteur le plus consommateur d’énergie et équivaut à 34 % de la consommation énergétique finale en France.

Par ailleurs, la crise de la Covid-19 a eu un impact conséquent sur le secteur, qui subit une perte massive en termes de volume d’activité. D’après un sondage mené par la B2PR, au moins 34 % des transporteurs routiers ont enregistré une baisse d’au moins 5 % de leur volume d’activité en 2020.

Des consommateurs plus regardants

Face à cette baisse d’activité, la question des moyens déployés aux pratiques environnementales se pose. Plus que jamais, la poursuite des objectifs environnementaux des PSL doit se faire en permettant l’amélioration des performances financières (bénéfice d’exploitation, retour sur investissement, et trésorerie) et opérationnelles (capacité à délivrer le produit à temps et efficacement).

Ceci est d’autant plus important que les consommateurs sont de plus en plus regardants non seulement sur le respect des délais, mais aussi sur l’impact environnemental de leurs achats. L’aspect le plus visible reste sûrement le suremballage des produits livrés à domicile et les cartons reçus à moitié vides

Cependant, les PSL réalisant l’emballage dans le circuit de distribution peuvent s’inspirer de certaines pratiques mises en œuvre par des entreprises de e-commerce comme Cdiscount. En 2019, le géant de la distribution en ligne s’est doté de la machine CVP-500 de Neopost Shipping permettant d’adapter le carton au produit et d’éviter ainsi le vide dans les colis.

En général, les pratiques vertes des PSL peuvent être de nature interne (gestion environnementale interne, éco-conception des packagings, recouvrement des investissements à travers la vente des stocks excédentaires et des matériaux utilisés) ou externes (approvisionnement vert, collaboration avec les clients).

Des pratiques spécifiques au secteur des transports existent comme la logistique inverse (opérations liées à la réutilisation des produits et matériaux), la mise en place d’entrepôts et de bâtiments écologiques, et des stratégies vertes de transport et de distribution en maximisant les capacités des camions de livraison par des commandes regroupées. Ainsi, le groupe STG utilise un système de terminaux mobiles leur permettant de contacter le camion le plus proche d’un point de collecte afin d’accomplir un enlèvement de dernière minute.

Une question de taille

Avant même la crise de la Covid-19, nous avions réalisé une recherche scientifique afin d’établir quelles pratiques de gestion de la logistique verte améliorent les performances opérationnelle et financière des PSL en France. Nous nous sommes focalisés sur les PSL de type 3PL, c’est-à-dire réalisant le transport, l’entreposage, et des services à valeur ajoutée comme l’emballage, l’étiquetage et la gestion des stocks.

Nous avons ainsi observé que les pratiques de gestion de la chaîne d’approvisionnement verte, et leurs impacts sur les performances opérationnelles et financières, varient chez les transporteurs selon la taille de l’entreprise (PME ou grandes entreprises).

En ce qui concerne les PSL de petite taille (moins de 250 salariés), notre étude montre que l’amélioration des performances financière et opérationnelle vient plutôt d’une mise en place conjointe des pratiques d’approvisionnement vert et d’éco-conception des packagings (emballages conçus de manière écologique depuis les matières premières jusqu’à l’étape de la distribution).

Par exemple, la PME CAP Express communique sur son engagement en faveur de l’environnement à travers notamment le recyclage des matériels d’emballages et palettes et le choix de fournisseurs respectueux de l’environnement.

13 choses à savoir sur l’engagement écologique de CAP Express (CAP Express, 2018).

En outre, notre étude montre que les activités d’éco-conception, comme le recyclage ou la réutilisation des emballages, se traduisent par une meilleure promotion de la qualité des produits et un plus grand bénéfice d’exploitation lorsque les petites entreprises développent des collaborations avec les fournisseurs.

Toutefois, étant donné que les pratiques vertes sont coûteuses et que les petits PSL manquent généralement de temps et de ressources, ils peuvent donc se montrer réticents à les développer davantage.

Le rôle clé des clients

Quant aux PSL de grande taille, ils sont capables de développer des programmes, des activités et des technologies environnementales leur permettant de déployer un large éventail de pratiques vertes (gestion environnementale interne, approvisionnement vert, éco-conception des packagings, collaboration avec les clients, mise en place d’entrepôts et de bâtiments écologiques, et stratégies vertes de transport et de distribution).

Ainsi, GEFCO a acquis en 2019 Chronotruck, une plate-forme digitale qui connecte les expéditeurs et les transporteurs dans le but de réduire les déplacements perdus. La mise en place d’une stratégie environnementale au plus haut niveau de la direction permet de développer une collaboration en amont, avec les fournisseurs, et de démontrer l’engagement environnemental envers les clients, conduisant ainsi à un meilleur fonctionnement et de meilleures performances financières.

Cependant, notre étude montre que ce type d’investissement n’est pas encore forcément nécessaire pour améliorer les performances des grands PSL. En effet, les clients se montrent peu sensibles aux activités qui concernent la fin de vie des produits.

Cela rend difficile pour les PSL de mettre en pratique la logistique inverse, voire peut nuire aux efforts de recouvrement des investissements. Ainsi, les PSL peuvent ne pas percevoir la nécessité de réduire les taux de rebut, car les clients ont peu connaissance des montants des actifs inutilisés que possèdent les PSL.

Ainsi, il nous semble fondamental de s’interroger sur la manière dont les clients peuvent accompagner leur prestataire de service logistique sur leur développement de pratiques vertes. La prise en compte du type de structure avec laquelle ils collaborent nous semble essentielle.The Conversation


Rebecca Stekelorum, Enseignante-chercheuse en stratégie et entrepreneuriat, ICN Business School; Issam Laguir, Associate professor, Montpellier Business School – UGEI; Sameer Kumar, Professeur en Management des Opérations et Supply Chain, University of St. Thomas et Shivam Gupta, Professeur associé en systèmes d'information, Neoma Business School

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons.

Lire l’article original.

Partager :
9882
Auteur de la page

Webmaster

Membre du comité d'animation GENIE.ch

Modérateur

Vincent Jay

Chef de projets